The Elder Scrolls III : Morrowind !
Ah… Morrowind… que de souvenirs… Vvardenfell, le Mont Ecarlate, Vivec… des noms qui résonnent encore dans mon esprit, chargés d’émotions, empreints de mystères… Rien, ni le temps qui file (presque vingt années déjà depuis sa sortie!), ni ses suites (Oblivion en 2006 puis Skyrim en 2011) ne m’auront fait oublier Morrowind.
Alors chaque année, je me reprends à ôter délicatement le jeu de sa vieille boîte cartonnée, toujours impatient à l’idée de fouler une fois encore le sol de Vvardenfell et de revoir la majestueuse cité de Vivec émerger du brouillard. Oh, je ne m’éternise pas en Morrowind ! A l’image d’un vieux pèlerin, je me contente de marcher dans les chemins que j’ai tracé voilà des années, simplement heureux de revoir les rivages de cette île mystérieuse, de redonner corps à mes souvenirs, enfin, heureux de renouer avec le passé. Les choses vont rarement plus loin.
Il faut dire que le jeu a tout de même vieilli. Ses détracteurs ne manquent d’ailleurs jamais de pointer du doigt ses graphismes désuets et la lourdeur de son gameplay… et il faut bien l’avouer, ils n’ont pas tout à fait tort. Alors quoi ? Pourquoi y revenir sans cesse ? Après tout, il y aurait bien d’autres horizons à explorer, d’autres aventures à vivre ! La nostalgie ? Sans doute. Oui, c’est vrai, la nostalgie est un sentiment fort mais elle est loin de suffire à expliquer un engouement si durable. Je crois que Morrowind est tout simplement un jeu exceptionnel. C’est une quête initiatique, c’est la découverte d’un monde inconnu et mystérieux. Joueur, personnage, nous ne sommes qu’un même étranger perdu sur une terre étrange.
Marquée du sceau de l’étrange, l’île de Vvardenfell l’est assurément. En son cœur se dresse le Mont Ecarlate, le volcan qui, depuis des milliers d’années, modèle Vvardenfell. Sur ses pentes abruptes et accidentées, les torrents de lave se sont depuis longtemps frayés un chemin vers l’océan, sculptant le paysage, creusant jusqu’à la mer de véritables tranchées, les foyadas, ou rivières de feu. L’île, façonnée par cette intense activité volcanique, abrite de nombreux écosystèmes, aussi variés que fantastiques, qui s’épanouissent aux quatre vents. Car outre le Mont Ecarlate, Vvardenfell ne compte pas moins de huit régions : les Terres Cendres, la Côte d’Azura, la Côte de la Mélancolie, Molag Amur, les Grandes Pâtures, la Faille de l’Ouest, les Iles Ascadiennes et Shéogorad.
Cette richesse se traduit par la présence d’une flore et d’une faune atypiques, souvent exotiques, parfois dérangeantes mais jamais artificielles. L’espèce végétale la plus emblématique, la plus impressionnante, de l’île de Vvardenfell est certainement le Parasol Empereur. Un champignon gigantesque, dont la taille égale bien souvent celle d’un arbre, qui pousse essentiellement dans la région des iles Ascadiennes et où il offre aux voyageurs fourbus un abri bienvenu contre la chaleur écrasante ou les averses fréquentes.
D’ailleurs, d’une manière générale, les champignons semblent bien adaptés au climat de l’île car on en trouve quantités d’espèces différentes. Il n’est pas rare en effet, lorsque l’on circule dans les marais de la Côte de la Mélancolie d’apercevoir, au travers du brouillard, la faible lueur bleutée d’une Russule Phosphorescente. Ailleurs, entre les racines pourrissantes d’un arbre mort, se tapissent des Coprin Violet ou des Hypha Facia. Un bonheur pour les alchimistes !
Mais tout cela il faudra le découvrir par soi-même. Inutile d’espérer un guide dans ce monde. Ni moi ni personne ne le fera. Et surtout pas ce foutu GPS totalement absent de Morrowind. L’outil semble être devenu indispensable dans tous les jeux récents… Ce GPS est une ruine ! Il empêche, étouffe, réduit, détruit toute immersion. A quoi cela sert-il de proposer des open world grandioses si l’on peut se contenter de fixer un marqueur sur une carte pour foncer ventre à terre d’objectifs en objectifs ? Oubliez ça dans Morrowind. Si l’on vous envoie dans une grotte pour y récupérer je ne sais quoi, tout ce que vous aurez c’est une série de points de repères (un carrefour, un rocher particulier, un détail topographique) susceptibles de vous conduire à bon port. Autrement dit, il est possible de se perdre. Et ça arrivera, croyez-moi. Pour s’en sortir, il faudra être attentif au paysage, poser des questions, planifier son voyage. Ne pas écouter les conseils des natifs de l’île c’est l’assurance de se retrouver à errer au milieu des foyadas des Terres-Cendres. Ça sent le vécu, j’y suis passé. Je m’en souviens encore très bien, j’étais à la recherche d’un tombeau dans la région de Molag Amur et je me suis fait surprendre par une tempête de cendres. La visibilité était effroyable et je me suis complètement égaré. Au bout de quelques temps, j’ai sacrifié (vraiment, à contrecœur) un parchemin de lévitation rare et particulièrement onéreux pour me sortir du pétrin et survoler ces terres accidentées à la recherche de cette fameuse tombe. Sur le coup je n’étais pas très content, aujourd’hui c’est devenu un souvenir fort. D’ailleurs, lors de sa sortie, le jeu était livré avec une très belle carte. Je crois que c’est l’unique carte en ma possession (et j’en ai quantité) qui soit écornée, déchirée, usée d’avoir tant servie. Et je trouve ça génial ! J’ai vraiment vécu ce jeu.
Il faudra du temps pour apprivoiser ces terres mais c’est une belle récompense de s’y sentir finalement à l’aise, d’en connaître chaque ravin, chaque colline, chaque passage enfin. Encore restera-t-il à en en connaître la faune. Et celle-ci n’est pas en reste car là aussi, Morrowind fait preuve d’originalité. Oubliez les poncifs. Ici, nul loup, nul ours dans les bois, point de minotaures dans les labyrinthes ni de zombies dans les tombeaux. Gare en revanche aux Guars et aux Alit, aux Netch et aux Kwama… ! Et que dire des échassiers des marais, ces immenses insectoïdes qui me terrifiaient lors de mes premières parties !? Comme je craignais alors qu’ils ne m’embrochent de leurs gigantesques pattes chitineuses et griffues ! Mais non, ces formidables créatures, parfaitement domestiquées, sont en fait un excellent moyen de transport dans les zones marécageuses.
Mais le plus merveilleux, ce n’est pas cette profusion de plantes exotiques et de créatures étranges, non ! car cela, n’importe quel designer peut le concevoir et il existe même des jeux où flore et faune sont générées de façon procédurale. Ce qui est formidable, c’est l’exceptionnel qualité de la direction artistique de Morrowind. Chacune de ces plantes, chacun de ces animaux semblent avoir une raison d’être. Le fantastique et le cohérent avancent ensemble.
Politique, religion, corporations, guildes… des dizaines de factions qui tentent de tirer leur épingle du jeu. L’île est un gigantesque échiquier où les alliances se nouent et se défont au gré des circonstances. A chacun de naviguer au mieux dans cet écheveau d’intrigues. Autant le dire, il ne sera pas possible de satisfaire tout le monde. N’attendez aucune reconnaissance du Temple et de ses membres si vous fricotez avec le Culte Impériale, n’espérez aucune aide de la Guilde des Voleurs si vous courtisez celle des Guerriers.
D’ailleurs, d’une manière plus générale, en début de partie il ne faudra espérer de l’aide de personne. Les Dunmer forment un peuple dur et inamical, dont le tempérament difficile a été forgé par un climat rigoureux et une histoire émaillée de tragédies. Si chacune des Grande Maison a ses priorités (l’honneur, la puissance, l’argent…) tous les Dunmer partagent une même fierté, un même orgueil. N’attendez aucune reconnaissance de leur part, vous n’êtes qu’un étranger à leurs yeux. Au mieux, vous serez ignoré, au pire, ouvertement méprisé. Gardez espoir ! Faites preuve de patience, rendez-vous utile, dialoguez surtout et un jour, après quelques transactions rondement menées, vous aurez la chance d’entendre un marchand vous gratifiez d’un (presque) chaleureux « Bonjour, que puis-je pour vous ? » en lieu et place d’un acrimonieux « Que voulez-vous ? »
Evidemment, la discussion est un passage obligé pour obtenir et conclure des quêtes mais au-delà de ces simples interactions rendues nécessaire par les mécaniques de jeu, les conversations sont d’une incroyable richesse ! On y apprend quantités d’histoires, d’informations (utiles ou non), de rumeurs (qui conduisent parfois vers des lieux et des aventures qui ne seront jamais mentionnées nulle part ailleurs qu’au détour d’une conversation tout à fait anodine), de morceaux de vie…
Il y aurait sans doute encore beaucoup à dire sur cette île mais il faudra jouer pour le découvrir !
J'ai eu, j'aurai encore beaucoup de plaisir à jouer à ce jeu.
Post edited April 02, 2021 by Vinmole